Tableau de Bord Stratégique
Le grand débat (américain)
Q3 2023 – juillet
Des célébrations sont-elles de mise? Les grands titres ont fait état de la baisse de l’inflation à 3,1 pour cent cette année, après avoir atteint un niveau record de 8,9 % il y a un an. L’économie américaine ne s’est pas écroulée en dépit de la hausse rapide des taux des fonds fédéraux à leur plus haut niveau en 22 ans. Les prévisions de récession continuent d’être reportées plus loin et, dans de nombreux cas, se sont atténuées. Alors… Tout va bien? Examinons ci-dessous les deux points de vue opposés dominants sur la question pour fournir un aperçu de notre position.
Prenons d’abord le cas du marché à la baisse. La lutte contre l’inflation est loin d’être finie. Les effets de base favorables provenant des prix des marchandises (en particulier des aliments et de l’énergie) commencent maintenant à s’amenuiser et présentent un risque de hausse. La résilience du marché du travail a aidé à propulser les salaires encore plus haut et en territoire réel positif (corrigés de l’inflation), ce qui devrait soutenir la demande globale. Il sera non seulement difficile de faire baisser l’IPC annuel à la cible de 2 %, mais le risque d’une pression inflationniste renouvelée ne peut être ignoré. Cela forcera la Réserve fédérale à resserrer encore plus (augmentant le risque d’un scénario « d’atterrissage brutal ») les conditions monétaires ou, au minimum, à empêcher le cycle d’assouplissement de se réaliser.
Bon, respirez.
Le point de vue opposé soutient que l’inflation se maintiendra dans une large tendance à la baisse. Selon le tableau ci-dessous, elle est entraînée par un renversement des loyers, lesquels fournissent historiquement une indication utile de la direction que prennent les coûts généraux liés au logement (lesquels comptent pour environ un tiers du panier de l’IPC américain). Cela permettrait à la Réserve fédérale de réduire les taux d’intérêt. L’effet à retardement du resserrement monétaire précédent ne serait pas suffisamment puissant pour entraîner l’économie américaine dans une récession, en particulier avec un déficit budgétaire grandissant et un système financier disposant de surliquidités déployées pendant les confinements liés à la COVID.
Nous avons sans doute l’air d’être assis entre deux chaises, mais c’est là que réside notre scénario de référence à l’heure actuelle. Nous convenons avec le camp du marché à la baisse que l’inflation persistera malgré la chute des loyers. Mais nous sommes également d’accord avec le camp opposé sur le fait que les fortes dépenses budgétaires contrecarreront les effets retardés du resserrement monétaire (et compenseront aussi les conséquences du futures hausses potentielles des taux d’intérêt), rendant l’hypothèse d’un « atterrissage brutal » relativement improbable. Le resserrement excessif de la Réserve fédérale reste le principal risque à surveiller, mais la résilience dont a fait preuve l’économie américaine devrait continuer à produire une « inertie positive » synergique à court terme.
Avec un si large éventail de résultats possibles à l’horizon, comment faire pour positionner les portefeuilles de la manière la plus avantageuse? Les obligations restent vulnérables dans ce contexte, alors que l’inflation persistante et une perspective de croissance grandement améliorée devraient exercer une force accrue sur la courbe inversée des rendements du Trésor américain (le déclassement de la cote de crédit de Fitch n’est pas particulièrement utile!). Les valeurs disponibles sont utiles à titre de tampon contre la volatilité et pour la génération de revenu, étant donné les rendements élevés (récents) à court terme, mais connaîtraient une érosion du pouvoir d’achat dans le contexte d’une augmentation des prix. Les actions (et particulièrement les expositions sensibles aux marchandises essentielles) restent le véhicule de préférence, offrant la meilleure protection contre l’inflation et un alignement sur la croissance. Le récent rebond a érodé quelque peu les évaluations et peut signaler un virage en faveur d’un scénario de marché en baisse. Toutefois, les sondages professionnels réalisés auprès des investisseurs montrent un dénouement du positionnement défensif dans les premières manches et le rapport risque-bénéfice reste toujours attrayant.

ESPÈCES
L’inflation dans les marchés émergents varie entre les pays, mais elle a généralement tendance à être moins élevée. De nombreuses banques centrales dans ces marchés ont agi par anticipation en élevant énergiquement leurs taux directeurs lorsque les premiers signes d’une pression inflationniste ont fait surface. Avec un rendement favorable étonnamment large par rapport aux marchés développés, les devises des marchés émergents offrent une possibilité de portage attrayante. Nous maintenons une position surpondérée en devises des marchés émergents dans les portefeuilles des clients.
OBLIGATIONS
En dépit de rendements nominaux beaucoup plus élevés par comparaison aux données récentes, les rendements réels dans la plupart des marchés restent profondément négatifs. Nous nous attendons à ce que l’inflation persiste plus longtemps que ce qu’en disent les prévisions actuelles, les obligations continueront donc à être relativement peu attrayantes par rapport aux actions. Nous maintenons une position sous-pondérée ce trimestre en ce qui concerne l’exposition aux instruments à taux fixe.
MARCHÉS DES ACTIONS
La faillite de nombreuses banques régionales aux États-Unis a ébranlé la confiance dans le secteur financier. Toutefois, la solvabilité des banques reste solide, les organismes de réglementation ayant agi rapidement pour consolider les liquidités et protéger les déposants, et le risque de crédit provenant de l’exposition à l’immobilier commercial peut être géré. Nous sommes passés d’une surpondération du secteur financier de titres américains de capitalisation boursière à une exposition pondérée en proportions égales aux banques américaines dans les portefeuilles des clients.
POSSIBILITÉS
Nous maintenons un point de vue favorable concernant la dette contractée sur les marchés émergents (MÉ), car nous nous attendons à ce que l’inflation des MÉ continue de se renverser, à ce que les taux directeurs baissent et à ce que la croissance dépasse celle des marchés développés. Toutefois, nous affirmons notre préférence pour la dette en devises locales plutôt qu’en monnaie forte (principalement en dollars américains) puisque cette dernière est exposée à un fléchissement du billet vert et a tendance à s’inspirer du marché des obligations américaines à haut rendement, marché que nous croyons vulnérable à des écarts de plus en plus grands. Pour ce trimestre, l’exposition aux obligations en monnaies fortes des MÉ a été réduite dans les stratégies orientées sur le revenu.

