Tableau De Bord Des Stratégies :
Vieux Continent, Nouveaux Défis
Q3 2022 – août
Les bonnes nouvelles sont plutôt rares en Europe de nos jours. Le continent fait face à un déluge de problèmes depuis que la Russie a lancé son offensive contre l’Ukraine en février. Les économistes prédisent de manière presque unanime de pauvres résultats et l’humeur des investisseurs est profondément pessimiste. Ces points de vue sont sans doute justifiés, mais, comme toujours, lorsque le consensus penche démesurément d’un côté, il y a intérêt à examiner la situation de plus près.
Il n’y a pas si longtemps, il y avait lieu d’être optimisme pour l’Europe avec la fin des confinements liés à la COVID-19. Le plan de reprise de l’Union européenne était important, tant par sa taille considérable (inversant des années de relative austérité fiscale) que par sa forme (dette émise conjointement), rapprochant efficacement les membres vers l’unité fiscale. La combinaison de la demande refoulée des consommateurs, des conditions monétaires souples et du pivot à une politique fiscale expansionniste a fourni un puissant essor de croissance. Cela aurait généré simultanément une « saine » inflation, laquelle a été voilée depuis la crise de la dette souveraine européenne en 2010-2012.
L’invasion de la Russie en Ukraine a changé radicalement cette dynamique. Alors que les conséquences de la guerre ont été ressenties à l’échelle du globe, elles n’ont pas été réparties de manière égale. En plus de la flambée des prix à la consommation, la surdépendance de l’Europe sur les importations de pétrole et de gaz de la Russie a créé une crise de l’énergie. Les pays de l’UE se sont rués pour ravitailler leurs stocks de gaz naturel avant l’arrivée des mois d’hiver, mais ils se heurtent à des limites de capacité de stockage, des conditions d’approvisionnement serrées et des prix exorbitants. Le déploiement de mesures de rationnement de l’énergie pourrait s’avérer nécessaire, ce qui nuirait grandement au secteur industriel et à d’autres secteurs d’activité. De plus, en raison du conflit majeur qui se déroule à leurs frontières et de l’afflux de réfugiés dans les pays de l’Est, les risques géopolitiques sont considérablement élevés.
Et comme si la guerre ne suffisait pas à aggraver la situation, il semble que l’Europe doive aussi lutter contre les attaques de l’environnement. Une forte canicule a causé des décès, des sécheresses et a fait chuter dramatiquement le niveau d’eau des lacs et des rivières. Le Rhin (une grande artère de marine marchande intercontinentale) retient particulièrement l’attention ces derniers temps. En effet, il n’est plus suffisamment profond à certains endroits pour y faire circuler les navires de charge.
Sur les marchés financiers, le point de douleur le plus important a été ressenti au niveau des ajustements monétaires. La banque centrale européenne (BCE) a été paralysée, ayant la double tâche impossible de freiner l’inflation tout en atténuant le choc économique provoqué par la guerre. Selon le tableau ci-dessous, la combinaison de l’inaction de la BCE (élargissant les différentiels de taux d’intérêt) et de la détérioration des prévisions de croissance ont poussé l’euro sous la parité avec le dollar américain, son plus bas niveau depuis la mise en circulation de la devise il y a 20 ans.
Mais si l’on regarde au-delà des grands titres pessimistes, plusieurs points positifs commencent à émerger, nécessitant d’avoir une perspective mieux équilibrée sur les actifs européens. La guerre nous a rappelé la principale raison d’être de l’Union européenne : la paix et la sécurité. La réponse unifiée du bloc à l’agression de la Russie est de bon augure pour l’intégration à l’UE à l’avenir. De plus, les investisseurs sont très conscients des défis présentés ci-dessus et l’évaluation des actifs européens traduit un pessimisme important. La dévaluation de l’euro exacerbera la pression inflationniste à court terme, mais elle servira également à stimuler de manière importante la compétitivité en matière d’exportations. Les évaluations des titres se sont également effondrées, comme l’a montré le coefficient prévisionnel de capitalisation des résultats sur l’indice MSCI Europe, tombant de 17 à 12 environ depuis 2020. Enfin, les indices des sociétés européennes à forte capitalisation sont dominés par des sociétés internationales dont les bénéfices sont davantage exposés à la croissance mondiale qu’aux conditions de la demande nationale.
ESPÈCES
Les espèces et les équivalents de trésorerie continuent d’offrir un compromis, agissant à titre de tampon contre la volatilité tout en réduisant simultanément le pouvoir d’achat alors que l’inflation reste élevée. Nous avons choisi de maintenir les espèces à des niveaux presque neutres ce trimestre.
OBLIGATIONS
À mesure que les grandes banques centrales mondiales commencent à resserrer leur politique ou continuent de le faire, la priorité du marché des obligations devrait pivoter de l’inflation à la croissance, étant bénéfique au segment à long terme de la courbe. Nous croyons qu’il est trop tôt pour allonger la durée, car l’inflation continue d’être le point dominant pour le moment et la Réserve fédérale des États-Unis commence à contracter son bilan. La position à court terme (en particulier les titres obligataires à taux d’intérêt variable surpondéré) a été maintenue ce trimestre.
MARCHÉS DES ACTIONS
Nous restons positifs sur les titres mondiaux qui offrent un refuge décent contre l’inflation et qui ont connu une contraction importante de leurs multiples d’évaluation dans le contexte difficile à ce jour. À l’inverse, nous voyons le risque émaner du resserrement des conditions de liquidité et des prévisions en matière de bénéfices anticipés qui ne sont pas entièrement ajustées aux circonstances économiques changeantes. Le positionnement en matière de titres reste surpondéré, mais nous avons réduit modestement notre exposition ce trimestre.
POSSIBILITÉS
La prise de position politique de plus en plus accommodante de la Chine et le refroidissement de son enthousiasme envers une régulation stricte de l’Internet devraient assurer des facteurs favorables pour les actions à l’étranger. Cependant, la différence marquée sur le plan de la politique monétaire par rapport au monde développé a érodé considérablement le rendement historiquement favorable des obligations chinoises. Une position en obligations consolidées chinoises a été liquidée en stratégies orientées sur les revenus, alors que l’exposition aux titres chinois extraterritoriaux (actions de classe H) a été accrue par des stratégies équilibrées et orientées sur la croissance.and growth-oriented strategies.